Audrey Zucker Fashion Incubator

Audrey Zucker est une Fashion Incubator; elle apporte toute son expertise de l’industrie de la mode aux marques de créateurs afin de les aider à s’adapter à l’ère digitale – et, inévitablement à la pandémie mondiale. Fondatrice de l’Agence Audrey Zucker, elle rêvait, enfant, de devenir styliste et passait son temps à dessiner des tenues. Gérer l’apparence et coordonner l’ensemble du résultat lui sont venus très naturellement. 

Racontez-nous votre histoire avec la mode…

Audrey Zucker: Mon premier travail a été de gérer la presse et la communication d’une nouvelle marque d’accessoires de mode. J’ai eu l’opportunité d’élargir mes fonctions et j’ai fini par gérer toute l’image de marque. J’ai alors compris ce que je souhaitais faire. 

En 2003, l’ère digitale a été une telle opportunité qu’avec mon partenaire Karlos Anastasopoulos, nous avons fondé Mozaik, un nouveau type d’agence: j’ai pu appliquer des stratégies digitales aux entreprises de la mode mais aussi à d’autres types d’industries comme l’hôtellerie.

En 2015, j’ai développé ma propre marque de mode, Mitos swimwear, une marque innovante de maillots de bain et de beachwear, ré-interprétant les techniques de broderie traditionnelles aux tendances actuelles. La marque fut un succès et vendue chez Luisa Via Roma, Matches Fashion et au Bon Marché Paris.

En 2019, j’ai décidé de mettre mon savoir-faire au service des créateurs de mode, des talents émergents et d’autres entreprises de mode afin de les aider dans des domaines tels que le marketing, la stratégie digitale, la stratégie retail, le développement du capital de la marque et la direction artistique.

Quels changements sont-ils nécessaires pour l’industrie de la mode pour faire face à la pandémie mondiale? 

Les vagues de changements radicaux dans l’industrie de la mode sont certainement les lourdes conséquences de la pandémie, mais les experts savaient même avant le Covid19 que l’industrie de la mode avait besoin d’un changement. Parce que le rythme des saisons de la mode était surréaliste, déconnecté des saisons réelles (créées pour le marché américain et européen, alors que l’on sait qu’aujourd’hui plus de la moitié des revenus proviennent d’Asie, du Moyen-Orient et d’Amérique du Sud), mais aussi parce que ce processus était à peine viable en particulier pour les marques premium et indépendantes, et parfois sans signification aussi pour les marques de luxe.

Des maisons de luxe telles que Gucci, Saint Laurent ou Dries van Noten ont fait des propositions spécifiques pour réécrire le calendrier de la mode, en abandonnant le système traditionnel consistant à développer, montrer, livrer et actualiser les collections. Des mots comme “sans saison”, créativité avant rentabilité et durabilité sont plus que jamais à l’ordre du jour. 

Entrons-nous dans une ère où le e-commerce est vital pour la survie des marques de mode?

Je pense que les marques devraient viser à devenir leurs propres e-commerçants et contrôler de plus en plus leur distribution et leurs flux de revenus. Ils devraient considérer les plateformes digitales comme un moyen de préserver leur portée et leur capacité d’exécution, tout en identifiant un modèle digital approprié.

Au-delà du e-commerce, il s’agit désormais de la valeur de la “e-marque” et de la manière d’atteindre l’audience de chaque marque sur ses plates-formes de prédilection. Travailler à l’amélioration du parcours en ligne et miser sur l’expérience client plus large doivent se dérouler en même temps que de nouvelles façons d’interagir avec les consommateurs en ligne.

Les services de diffusion en direct, les capacités d’inventaire omnicanal, les plateformes de commerce social, les nouveaux canaux et les formats innovants en sont quelques-uns. Les stratégies digitales doivent être prioritaires. Les investissements et les dépenses marketing doivent être transférés vers les canaux numériques, avec un suivi précis du retour sur investissement.

Quel témoignage pouvez-vous apporter quant à l’adaptation de l’industrie de la mode à l’ère digitale et comment aidez-vous concrètement les marques de créateurs depuis la pandémie? 

 2020 sera peut-être une année sans semaine de la mode physique telle que nous la connaissons, mais elle offrira un nouveau panorama, bien nécessaire pour les créateurs, avec des défis digitaux au premier rang de l’agenda.

 L’objectif principal des salons sera d’engager les clients, sans règles de formats et sans obligations de montrer chaque saison.

 Ce que je propose et proposerai aux marques avec lesquelles je travaille, c’est de mener leurs stratégies avec cohérence et authenticité tout en se connectant à leur public final dans leurs propres espaces et vies. La clé du succès sera que les marques deviennent des pionniers du digital, pas seulement des acteurs digitaux. À ce titre, la création de contenu digital devrait devenir le principal mode d’interaction de la marque avec le public.

 Le digital sera le nouveau terrain de jeu des marques qui pourront réinventer leurs présentations à travers les titres médiatiques qui correspondent le mieux à leur positionnement. Les marques ne doivent pas le voir comme un remplacement des présentations physiques, mais comme l’occasion d’essayer de nouveaux formats et de toucher un public plus large de manière surprenante, renforçant la dimension expérientielle des événements, des interactions, des connexions avec les influenceurs et les VIP.

Votre Agence se concentre sur le travail avec les talents émergents (créateurs et marques de mode); comment pensez-vous que les talents émergents peuvent lutter contre le ralentissement économique causé par la pandémie de Covid-19?

Il existe une opportunité concrète pour les talents émergents de proposer des produits significatifs avec un véritable positionnement local. Il pourrait y avoir un ralentissement des volumes, mais les marques émergentes construiront pour l’avenir, trouvant comment produire à portée de main, de manière responsable et avec une évolutivité bien définie.

 Les marchés locaux et nationaux seront aussi importants que le paysage international.

Les marques de demain peuvent avoir plus d’occasions de démontrer leur unicité à travers leur stratégie de communication, sur les nouveaux médias, dans le respect de leur rythme, en évitant de céder au rythme effréné de l’industrie de la mode traditionnelle telle que nous la connaissons.

 Je pense aussi que l’avenir des marques devrait être fait de plus de collaboration et non de concurrence. Le ralentissement sera l’occasion de se recentrer, tous ensemble.

 Et enfin, qui suivez-vous sur Instagram pour inspirer votre garde-robe?

Je suis des tonnes de comptes, mais l’inspiration de ma garde-robe ne vient pas d’influenceurs spécifiques. J’ai des marques qui me plaisent particulièrement et qui me suivent comme  Cult Gaia, Marysia, Zimmermann pour les marques de bain les plus connues ou les plus appréciées de Mitos et Maansislandwear. Ce que j’aime aussi, c’est découvrir de nouveaux mondes de marque avec un message profond, lorsque vous ressentez la véritable inspiration derrière les engrenages marketing.

Photographies @ Yiorgos Mavropoulos.
Lieu: The Artist Hotel.